On imagine souvent que l’air extérieur est plus pollué que celui à l’intérieur de nos bâtiments. Pourtant, c’est l’inverse. Alors que l’air ambiant contient environ 400 ppm de CO₂, une salle de classe, une crèche ou un bureau mal ventilé peut monter jusqu’à 4000 ppm. Autrement dit, nous passons nos journées à respirer un air confiné, ce qui fatigue notre cerveau et montre le lien étroit entre la qualité de l’air intérieur (QAI) et la performance cognitive.
Le CO₂ : un indicateur clé de la QAI
Même à des concentrations modérées, le dioxyde de carbone peut révéler des problèmes sérieux de ventilation. C’est un excellent thermomètre de la qualité de l’air intérieur : plus il monte, plus cela signifie que l’air est mal renouvelé. Et quand le CO₂ grimpe, nos capacités cognitives plongent.
Quand l’air intérieur pèse sur notre performance
Les chercheurs le montrent clairement : un excès de CO₂ agit directement sur nos fonctions cérébrales.
→ À partir de 1000 ppm, on commence à ressentir des maux de tête, une difficulté à rester concentré et une impression de brouillard mental (Satish et al., 2012).
→ Autour de 1500 ppm, les études identifient une perte d’environ 15 % de nos performances cognitives : la mémorisation se fait plus lente, les fautes d’inattention se multiplient, les décisions deviennent plus hésitantes (Fan et al., 2023).
→ À 2500 ppm, c’est une véritable chute libre : près de 50 % de baisse de performance sur les tâches complexes comme la réflexion stratégique, la planification ou la prise d’initiative (Satish et al., 2012).
En clair, un élève dans une classe confinée retiendra moins bien sa leçon, et un salarié en réunion perdra en créativité et en efficacité. Ce n’est pas qu’une statistique scientifique : c’est ce que chacun ressent quand l’air est « étouffant » et qu’on peine à garder les yeux ouverts après une heure de cours ou de réunion.
Les études se multiplient
Dans une étude menée dans des bureaux américains, les scores cognitifs des employés étaient 61 % plus élevés dans un environnement bien ventilé, et même 100 % plus élevés lorsque la ventilation était renforcée (Allen et al., 2016).
Et il ne s’agit pas seulement d’adultes. La méta-analyse de Fan et al. (2023), portant sur 15 études, confirme que le cerveau des enfants est encore plus sensible à la qualité de l’air.
La nouvelle obligation pour les ERP
Ces constats ne sont pas restés lettre morte. Depuis 2024, la réglementation R.221-32 impose aux établissements recevant du public accueillant des enfants (écoles, collèges, lycées, crèches, centres de loisirs) de réaliser une évaluation annuelle de la qualité de l’air intérieur. Le message est clair : le CO₂ n’est pas seulement un chiffre sur un capteur, c’est un facteur de réussite scolaire et de santé publique.
Mais les établissements scolaires ne sont pas les seuls concernés. Les universités, les bureaux, les open spaces et les salles de réunion sont tout autant exposés. Dans un contexte où la concentration, la productivité et l’innovation comptent, ignorer la qualité de l’air intérieur revient à fermer les yeux sur un levier de performance puissant.
En résumé
La qualité de l’air intérieur est un enjeu invisible mais décisif. Un air appauvri en oxygène et saturé en CO₂ nous rend moins attentifs, moins créatifs, moins performants. À 1500 ppm, c’est 15 % de performance en moins. À 2500 ppm, c’est la moitié de nos capacités qui s’évapore.
Alors, posons-nous la question : combien d’élèves, d’enseignants, de collaborateurs perdent chaque jour une partie de leur potentiel simplement parce que l’air de leur salle n’est pas assez renouvelé ?